Alexis Fichet

Interprétations

Rosa Rosa Rosa Lind

Fable mystérieuse

Texte étrange et un peu fou, d’une minutie étonnante, dont le déroulement ne laisse en rien prévoir la fin, et encore moins la morale. Audace d’imaginer, y compris avec cet humour un peu froid, le massacre des enfants par eux-mêmes.

La fin me laisse perplexe, mais saisi. Douze enfants assassinés seraient autant de souffrances évitées à l’avenir, pour eux-même et pour les autres. Un calcul arithmétique qui ne tient pas compte des bonheurs, qui ne joue pas à la traditionnelle addition des joie et des peines. Qui ne garde que la souffrance.
Que penser de ces enfants morts par prévention, pour éviter la souffrance à venir ? Si l’époque à venir n’est que souffrance, doit-on tuer les enfants ?
Finalement cette question : tout comme il est plus facile d’imaginer la fin de l’humanité que la fin du capitalisme, serait-il plus facile d’imaginer assassiner ses enfants que ne pas les faire ?

La fable mystérieuse de Marion Stenton m’amène à cela : on arrêtera de faire des enfants pas peur de la période à venir, par peur de la souffrance à venir. C’est quelque chose dont on perçoit déjà le frémissement.

PS : Je précise. La peur de la souffrance à venir est avant tout psychique, née de la perte de sens, de la disjonction infernale entre ce que nous savons de l’avenir et ce que nous en faisons. Nous n’avons pas peur de la catastrophe : de tout temps on a su rire et faire des enfants au milieu des guerres ou des difficultés. Nous sommes catastrophés par tout ce que nous savons de notre situation et la façon absurde et mortifère dont nous continuons à y vivre. On nous enlève l’espoir, tel que définit par Vaclav Havel : « L’espoir ce n’est pas de croire que tout ira bien, mais de croire que les choses auront un sens. »